N°2 – type dodécagénaire
Voici donc un premier type dodécagénaire pour compléter le N°2 de l'Ennéagramme. Typologie à la fois facile et complexe, ô combien essentielle, absente des typologies de Jung. La compréhension du N°2 relève de « l'Intelligence » sociale, terme associé à cette sphère symbolique. Il me semble pertinent de donner quelques interprétations plus personnelles en renfort de cette source pour tâcher de faire comprendre ce que disent – ou pas – les typologies philosophiques zodiacales à son sujet.

N°2 zodiacal :
1 - Typologie indissociable du collectif/global, de l'ensemble, voire de l'informe où l'irrationnel règne. Notions de dissolution, d'intégration à l'universel. Plasticité psychique, malléable, impressionnable, vulnérable, réceptif, en recherche d'inflation émotive. Type prothéen (change-forme) qui a du mal à faire du riche chaos un monde organisé. Se cherche, tâtonne, se fuit, flotte ou nage entre deux eaux... Instable errant, confus et brouillon, indécis et irrésolu, incohérent. Signe complexe qui peut devenir aberrant, irrationnel...
Mais écoute et aime aider les autres. S'il réalise son unité intérieure, par affirmation du moi, ce type peut vivre un état de grâce, mystique/saint clairvoyant. Désintéressé de soi, il donne de lui-même voire sacrifice rédempteur. Dresse la voile en direction des brumes lointaines pour atteindre des régions inconnues, exil extérieur. Poussée vitale vers le vaste possible, l'internationale cosmopolite communautaire ou mystique ; vers un vaste univers où chacun peut s'y confondre... Échapper à la limitation individuelle.
2 - Intelligence animale ; passé 35 ans, passe souvent de proie à chasseur ; peut faire du mal sans vraiment le faire exprès. Peut mythifier sa partenaire/collectivité puis en changer s'il en trouve une avec meilleure auréole... Dès que quelque chose se matérialise, il se tait, garde son secret, fuit et s'enferme car doit prendre une décision. Plus il est en contradiction, plus sa sensibilité sera douloureuse. N'arrive pas à se situer, prisonnier en société. Déchiré entre lourd passé et avenir incertain, il peut être aussi captif, en exil intérieur, demeure dans l'asile de sa petite île, prisonnier d'un petit espace/prison, où sa conscience roule une masse d'impressions diffuses. Nébuleux, informe, enlisé, il risque d'échouer sur les rives du monde de l'épreuve. Attitude hagarde, regard voilé, nomade pourchassé par une chimère, somnambule errant... Goût de l'ombre, se cache au fond de petites chambres, phobie des fantômes, pièges, trahisons. Oscille entre narcotisation et foi au travail.
3 - Une situation typique de 2 est celle des « deux souverains » avec 2 territoires/conseils/monnaies... Le « roi », chargé ici des chaînes de ses souvenirs, erre à la poursuite de lui-même pour obtenir une imprévisible métamorphose. En devenant victorieux de lui-même, il le devient aussi de l'ennemi (antagoniste/adversaire...) ; devient « roi de la meilleure tradition »...

Interprétation : Nous allons tenter de démêler le truc ; l'habitué des typologies remarque déjà qu'il y a confusion possible avec pléthore d'autres numéros. C'est précisément la caractéristique de 2, il n'est pas tant Caméléon – au sens camouflage/adaptation du N° 3 – que parodie mal faite, exagération aléatoire des autres typologies/numéros... Tragédie d'un mauvais comédien de province ou cantonade de grandeur-nature hystérique qui, à force de crier, n'est plus entendue... Loup grossièrement déguisé en grand-mère, en Sauveur du triangle de Karpman... De fait, 2 ne sait pas « en garder sous le pied » comme dirait Jean Rochefort (un N°5, opposite de 2), grand observateur de nos comportements ridicules... Mais 2 n'est pas un Distracteur/F introverti pour autant, n'est pas l'épouvantail N°11. Il est le summum de l'extraversion conformiste ; celui qui tourne – gravement – le variateur électrique de l'expérience de Milgram au nom de la communauté... Il est là le drame de 2 ; au nom du collectif, son rôle l'emporte... Il n'est plus lui-même et le danger n'est pas tant dans son identification que dans la contagion mentale de son groupe/partenariat. Ce double jeu de miroir, où toute société peut se perdre, où il ne faut pas chercher « c'est-çui-qui-dit-qui-est », est l'Intelligence sociale... C'est d'abord une étincelle dans le regard de celui qui reconnaît et comprend cette réalité du N°2 ; celui qui dit merci autant à 2 qu'à ses parèdres, à sa cour des miracles, à la valeur de leur estime collective... Estime cristallisée sur leur seule « zone d'intérêt »... Le singulier qui dit là merci et fait croire qu'il a « besoin » est alors reconnu, potentiellement intronisable, apprécié pour sa capacité à jouer le jeu, à ne pas réagir. Il ne sombre pas dans l'aigreur ou la dénonciation qui – de toute façon – fragilise et isole celui qui s'y livre, renforce l'autorité du groupe qui n'attendait pas mieux.
1 - Le N°2 est bien du côté de la matérialité de la force-nuit ; il est le trésorier, le détenteur de la cassette, le gérant du bazar, le « propriétaire » Garofoli qui met un cadenas sur la marmite, Fagin d'Oliver Twist, Thénardier l'hôte impayable, Danglard le sans-prénom/introversion... L'archétype de certains français – collabos, comme tout le monde – qui crachaient dans la soupe qu'ils servaient aux Allemands, qui faisaient certes passer la frontière à des justes – par un N°4 – mais pas gratuitement... Si 2 aime effectivement susciter des besoins, voire saboter ou faire mal pour se rendre indispensable, n'oublions pas qu'il est l'homme de la situation ; le bon Docteur Jekyll... voire Destouches qui dit à ses tuberculeux surtout ne vous allongez pas... Sa relation-miroir est bien celle d'une double névrose ; la sienne et celle de l'autre/collectif. « Notre 2 » (expression de 8) est ainsi déjà pardonné, ombre d'un peu tout le monde... Il permet de laisser faire, d'abandonner gestion et soucis ; on sait que – quoiqu'il arrive – on pourra compter sur lui. Il est bien le Sauveur, l'Ami-le-vrai... Bien comprendre cette double névrose, ce double flux-transfert des deux côtés pour une curieuse alliance thérapeutique. Ne pas chercher qui est le plus manipulateur des deux à ce jeu où tous sont bien dominés par la même nature/inconscient... Il faut avoir connu de véritables 2 – et leurs commensaux – pour comprendre ; médecin alcoolisé qui réduit sa consommation au moment d'aider les nécessiteux à la croix-rouge, à moins qu'il ne parte loin en french doctor... Grande sœur qui gère la vie et les comptes d'une plus jeune, l'engraisse au sens propre et la bourre de médocs à en crever... Épicier qui vend des tonnes de croquettes à une « Dame aux chats » au risque d'empuantir tout un quartier ; dès le départ il avait compris le truc et se justifie en disant que, de toute façon, elle serait allée acheter ses croquettes ailleurs...
2 - Même si c'est toujours un peu tard, il vient toujours ce moment où, à défaut d'un Montecristo/3, un Saul Alinsky réussit à fragiliser un N°2 pour qu'enfin son groupe le lâche, malgré les promesses de soutien ad vitam... Stigmatiser le « chic type de la bande », selon Clouscard, pas tant chef qu'entremetteur disposant des deux codes entre son « club » et la bourgeoisie ( promis, je vous développerai ça pour un futur N°2...). Alors apparaît le reflux, la bascule rythmique immuable. 2 victime s'enlise, ses yeux s'embuent, transe... mais il n'est pas 9. Névrose, douleur, dépression... mais il n'est pas 10. Le N°2 prend sur lui mais il n'est pas le vrai patron/12 ou le fusible idéal/1... Il ne sera pas non plus le vengeur masqué, l'homme au périscope, Némo/3 ; ni le sadique aigri 1 ou 8... Non, il se laissera simplement pourrir – malade imaginaire, pâle imitation de 10 – aussi bien qu'il laisse pourrir la situation ; après lui le déluge... Savoir observer alors certaines réalités territoriales, et autres collectifs dits sociaux, qui « ferment » à son départ, même si ceux-ci généraient bien de la diversité, redistribution et emplois... Dure loi des N°2 et de leurs réseaux, du partage du gâteau... avec la bénédiction des hauts 9 institutionnels ; lavez votre linge sale en famille... tant que l'ordre règne.
Le N°2 peut donc passer aussi de proie à chasseur... Il refait alors ses comptes d'apothicaire, se « tempère » non pas en dissimulant son côté sombre mais, au contraire, en l'activant un peu plus, en redevenant Mister Hyde... Il rassemble quelques fidèles pour un dernier coup. Avec de la chance – car souvent accompagné d'un N°4 qui fait office de rabatteur et de poinçonneur des lilas –, il peut même tomber sur quelque communauté qui lui donne un dindon en offrande ; signe tacite de leur mort lente assurée, usure à leur insu, que le parasite 2 aura invariablement reconnu, avec ironie, comme cause à effet de sa nécessité... Il faut avoir vu les curées chez cette figure de notaire, les réactions effroyables pour un bijou, un jeu de pneus, ou une part de gâteau... Il n'y a dès lors plus de « famille » qui tienne, encore moins de culture, que des compagnons associés à leur suffète du moment. Et nous ne développerons pas plus cette farce qui capte savamment les subsides publics pour l'intérêt privé, impose ses taxations locales à 15%, tout en usant psychosomatiquement toute concurrence, tout individu qui voudrait analyser d'un peu trop près la sphère du 2... Nature inconsciente ou « habitus des camarades », phénomène de groupe bien connu des légendes ; le 7e de 6, le 13e de 12... L'homme noir, le frère noir, l'ego justificateur, le pouvoir derrière le trône... Mais qui est vraiment cette ombre : 1, 3, 7 ou 11 ? Quand on dit que 2 s'isole, part sur son île déserte pour se mettre au vert, il n'est en réalité qu'une imitation de 12... N'est pas ermite qui veut malgré le soutien indéfectible de 6.

3 - C'est simple, 2 est le « faux-héros », l'usurpateur de la classification des contes de Propp. Celui qui prend la place du héros/7 par lui-même ou, mieux, qui est coopté par un collectif pour être celui-là... Même dans sa retraite, ce faux-héros ne sera encore qu'une parodie d'une grandeur avérée, autre, légitime, noble... Drame de la bourgeoisie. Mais, s'il fallait justifier 2, le pire semble qu'il agisse plus par destinée fatale que réelle stratégie consciente ; 2 l'Extraverti-conformiste n'est pas un Tertium. Il œuvre mécaniquement pour son groupe, pour son égrégore, pour sa salle des professeurs, son atelier de concepteurs, son conseil scientifique... Là aussi, il œuvrera tour à tour au labo de façon collective et seul, retiré... Archétype du savant fou, aux cheveux de sorcière hystérique, qui tolérera des « pertes » au nom de la science ou de son idéal collectif, que l'on distinguera du chirurgien 8 et du professeur déchu 1... Le plus fascinant reste les rares cas où l'usurpation d'identité est positive... C'est Martin Guère qui remplace un mari violent avec le consentement de la femme, N°10 désignée alors qu'elle est indéniablement 1 ; la seule qui saura rester à sa place... Fabuleux metteurs en scène qui savent identifier les typologies de leurs acteurs pour des rôles qui leur vont comme des gants. Ou pas... Madame Bovary – un N°9 – n'est précisément pas la Daronne... Destin tragique, flux et reflux de celui qui n'aura pas su lever le pied quand il fallait...
Considérer plusieurs sphères/collectifs et leurs usurpateurs, vaste réseau fratricide... Le monde de 2 est vraiment celui de la manipulation par les éléments de langage, PNL, hypnose... Celui de la phobie, de la folie et du syndrome :
- Syndrome de Diogène : accumulation sans fin du même « matériel » en prévision/provision. Avarice matérielle.
- Syndrome de Münchhausen : chuter à son tour, tomber malade, pour inverser les rôles et attirer la compassion. Le Syndrome du Sauveur est identique mais dans un sens psychique.
- Syndrome de l'Infirmière : 2 n'hésite jamais à piquer un peu la peau, à rajouter un peu d'éther pour raviver une plaie... Mais elle n'est pas dans le sadisme de 8 ou 1. C'est juste un accord tacite, entre elle et son protégé, des fois que celui-ci oublierait la douleur qui les unit... Hystérisation de la situation qui anime et réanime sans cesse la relation.